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L'Histoire de Marie-Pïer

 

Depuis que je suis toute petite, je sais que je veux être mère. De 2 enfants. Dans mon monde idéal, à 25 ans je voulais avoir eu mon premier.

 

Quand j’ai rencontré mon conjoint j’avais 28 ans et toujours pas d’enfants. De son côté, il en avait déjà. On a donc abordé le sujet assez rapidement puisque pour moi, c’était non négociable. Heureusement, il voulait une grande famille alors il était partant pour le projet! On a tout de même attendu un moment, question d’apprendre à bien se connaître et s’assurer que ça allait durer. Et puis un beau jour, on se décide.

 

Alors que pour toutes les femmes de ma famille, une fois la décision prise ça fonctionne, ça n’a pas été tout à fait mon cas.

 

Chaque mois, la même histoire se répète. Je guette chacun des signes. « Oh on dirait que je suis plus sensible! Je crois que mes seins sont plus gros! ». Je fais un test de grossesse pleine d’espoir.

 

C’est négatif.

 

Mais c’est pas grave, je ne suis pas encore en retard. Le lendemain mes règles arrivent… en même temps que mes larmes.

 

Et l’histoire se répète, encore et encore, chaque mois.

 

On me raconte l’histoire d’une telle, qui a eu 5 tests négatifs et ses règles pendant 5 mois alors qu’elle était enceinte. Une parcelle d’espoir s’accroche quelque part dans mon esprit. Espoir qui s’anéantit un peu plus chaque mois.

 

On me dit d’arrêter d’y penser, que ça va arriver tout seul. Ok mais je fais ça comment moi alors que c’est le rêve de ma vie? Le temps passe et dès que la pensée que je devrai peut-être me faire à l’idée de ne pas connaître la maternité m’effleure, je m’effondre. Je ne peux même pas imaginer ce que je ferais.

 

On me dit que plein de femmes y arrivent… Plein de paroles qui se veulent bienveillantes et encourageantes mais qui me font mal.

 

On n’en parle pas aux enfants parce qu’on ne veut pas créer de faux espoirs. Je me sens de plus en plus seule.

 

Finalement, un beau jour on se décide à entreprendre un processus de fécondation In vitro. Mon ovule est fécondé et transféré dans mon utérus. Il a 2 semaines pour s’accrocher, au terme desquelles, je dois faire un test de grossesse.

 

Négatif. Encore.

 

Mais pourquoi? Pourquoi moi? Pourtant, je le sais qu’un embryon était dans mon ventre. Je l’ai vu sur l’écran. On recommence un autre cycle.

 

Même résultat.

 

Même si ma tête sait que c’est pas comme ça que ça fonctionne, mon cœur ne peut s’empêcher de penser que, comme mon conjoint en a déjà 2, c’est forcément moi le problème… Je me sens de plus en plus seule, j’ai de plus en plus peur.

 

Il s’est écoulé déjà 3 ans, le temps file. On décide d’y aller avec la stimulation ovarienne. 34 ovules! On me dit que ça ne s’est pas souvent vu, qu’habituellement, c’est 5-6. De ces 34 ovules, il en restera 6 (en moyenne, c’est 2-3). Wow, bonne nouvelle, on a plein d’essais possibles alors!

 

Mais comme j’ai fait une sur-stimulation, on doit attendre 1 cycle avant de commencer les injections pour éventuellement faire un transfert. Les embryons sont congelés en attendant que mon corps soit prêt.

 

Le jour du transfert arrive. L’embryon prévu est préparé la veille mais au matin, les embryologistes se rendent compte que le développement des cellules ne s’est pas poursuivi, ça ne sert donc à rien de l’implanter. Ils en préparent un autre pour le jour même. Il sera encore un peu congelé lors du transfert mais on nous assure que ça ne dérange pas. Sauf qu’on n’a pas la certitude que les cellules se développent. On prend le risque. Je suis déjà là, sous hormones depuis des semaines, je veux tenter le coup.

 

Et je ne regretterai jamais cette décision puisque cette fois sera la bonne. 2 semaines plus tard, je passe le test de grossesse et on me rappelle en après-midi pour m’annoncer que le résultat est positif. Je n’arrive pas à le croire, je pleure de joie.

 

Je connaitrai une belle grossesse. Le protocole par lequel j’ai dû passer a, je crois, fait en sorte que je veux profiter de chaque moment.

 

Mon fils naît en parfaite santé! Le temps file, le programme d’aide financière auquel nous avions eu accès n’est pas remis en place donc pas possible pour nous d’en avoir un deuxième. Mon idéal était d’en avoir deux, mais je m’étais toujours dit que si je pouvais en avoir au moins un, je serais comblée.

 

Puis un jour, 3 ans plus tard, un courriel atterri dans ma boite.

            Bonjour,

 

            Ceci est pour vous aviser que vous devez maintenant prendre une décision concernant les 4 embryons restants. Voici les options :

  • Payer un frais d’entreposage si jamais vous souhaitez à nouveau un transfert dans quelques années
  • Les donner pour que d’autres familles puissent vivre ce rêve
  • Les donner pour de la recherche
  • Les détruire

 

Je sens la terre se dérober sous mes pieds. On en n’aura pas d’autres, ça c’est décidé. Mais qu’est-ce que je fais? J’aimerais avoir la grandeur d’âme de les donner à d’autres familles. Mais c’est impossible pour moi. J’ai beaucoup trop peur de passer le reste de mes jours à vouloir savoir ce qui est arrivé avec ces 4 embryons, à les chercher partout, même si ça n’a pas de sens. Alors je fais ce qui me semble le plus juste à mes yeux à ce moment : je permets qu’ils puissent être utilisés pour la recherche, pour pratiquer les techniques de transfert et ainsi, que ces recherches puissent donner la chance à plus de familles de connaitre ce bonheur.

 

J’ai 30 jours pour changer d’idée, après quoi, je dois me rendre sur place pour signer en personne mon choix définitif. Je crois que j’ai encore plus pleuré cette journée-là que toutes les autres journées, même celles où je recevais un résultat négatif. J’écris ces lignes et j’ai encore les yeux humides, même après 4 ans. Les employés de Ovo présents ce jour-là ont été d’une grande douceur!

 

 

Mon fils vient tout juste de célébrer ses 7 ans, j’ai eu le bonheur de vivre la maternité. Il a une relation privilégiée avec son frère et sa sœur (qu’on s’est toujours refusé à appeler demis. Chez nous ça n’existe pas!)

 

Le parcours peut être long et difficile, il arrive qu’il se solde parfois par du beau. Je me surprends des fois à avoir envie de sortir des phrases toutes faites à celles qui vivent l’infertilité (et je sais qu’on est plusieurs) mais je me retiens parce que je me souviens comme ça faisait mal même si l’intention n’était pas mauvaise.

 

Alors sachez que je vous envoie tout mon amour et je vous souhaite du plus profond du cœur que ça fonctionne.

 

Avec amour et bienveillance,

 

Marie-Pier Coté, Agence Deuxième tête

 

 

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